18 November 2020

Jaguar, comme un très grand nombre de constructeurs automobiles, évolue actuellement dans une période structurante, balloté entre la nécessité d’évoluer pour s’inscrire dans la mobilité de demain et la douce mutation interne vers une marque plus impactante, qui ne renie pas pour autant son héritage. La XE s’inscrit pleinement parmi les modèles pivot au sein de la gamme du fabricant britannique.

  • 4 cylindres, essence, turbo, 1’997 cm3
  • 300 ch à 5’500 t/min
  • 400 Nm dès 1’500 t/min
  • Boîte de vitesse automatique, 8 rap.
  • Vitesse maxi : 250 km/h
  • 0 à 100 km/h en 5.7 sec.
  • Poids : 1’615 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 4’670 x 1’850 x 1’410
  • Conso. mesurée : 8.1 l/100km
  • Emissions CO2 : 190 g/km (E)
  • Dès CHF 59’300.-, mod.essayé: CHF 78’820.-


Texte et photos : Matthieu Giraudier


Il n’est pas une mince affaire de succéder à la X-Type, dont les ventes furent jugées décevantes, les concurrentes allemandes l’ayant dominé outrageusement. Avec six années d’absence au catalogue d’une « compact executive car », Jaguar décide de remplir le creux en 2015 avec la XE, dont nous vous avions proposé un essai de la première mouture en 2015. La mode des SUV passant dans l’entremise, la berline fraichement débarquée arrive à tirer son épingle du jeu, sans pour autant s’imposer.

Serait-ce une erreur de stratégie de la part des hommes de Whitley ou une pépite ignorée par le marché ? Des éléments de réponse dans la suite, notre contre-rendu à propos de cette nouvelle génération présentée l’année dernière.

A l’extérieur

Le dessin de la XE fait depuis le début l’unanimité : élue plus belle voiture de 2014, année de son annonce, elle séduit et marque nettement sa différence avec son aînée spirituelle. Exit le style un peu « plan-plan » de la X-Type, la berline compact nouvelle génération s’offre un design plein de caractère, affirmé et structuré. Les traits sont tirés, les arêtes saillantes, les proportions allongées, en bref la XE s’inscrit pleinement dans le renouveau stylistique de Jaguar.

La face avant est bel exemple de construction harmonieuse, avec des projecteurs au regard volontaire, voire un brin rageur. Le bouclier, ici spécifique à la finition R-Dynamic, est finement sculpté et intègre un motif uni de grille, raccord avec la calandre. Les nervures du capot moteur portent le dessin vers l’avant et concourent à l’esprit racé de la XE.

A l’arrière, le tempérament est plus calme. Les phares confèrent une allure plus « executive » à l’ensemble, étant plus sobre dans leur design. La chute de pavillon est harmonieuse et se termine sur le hayon de malle bien prononcé, donnant à la XE une allure de berline tricorps.

De côté, l’anglaise parait élancée et compacte à la fois. La ligne de ceinture n’est pas exagérément haute, ce qui profite aux surfaces vitrées. La jupe exclusive au niveau de finition R-Dynamic est bien marquée, pour offrir un accent timide de sportivité. Fidèle au concept de la marque, l’arche de roue avant se pare d’une baguette chromée, pour étoffer le dessin global.

A titre personnel, je suis très réceptif au look de la XE. Je le trouve bien équilibré entre caractère racé et élégance statutaire. Cette auto est à mes yeux franchement séduisante et moderne.

A l’intérieur

L’habitacle est tel comme on s’attend pour ce type de voiture : sobre, sans fioritures, bien que tirant beaucoup trop sur le monochrome noir.

Pour la partie infodivertissement, la proposition faite par notre niveau de finition est complète. Les assistances à la conduite sont légions ; les moniteurs, centraux comme le cockpit, prodiguent des informations claires dans un environnement tactile rapide, bien que pas toujours très ergonomique. Témoin le système de navigation, qui s’avère être compliqué à paramétrer, avec des fonctionnalités indisponibles sur simple touche, comme l’ouverture d’un menu « Destination », ce qui semble être pourtant le b.a.-ba de ce type de fonctionnalité. D’une manière absolue, l’électronique embarquée est de bonne facture, avec une réactivité des capteurs relativement bonne, dans la moyenne du genre. Le panel d’enceinte Meridian fait quant à lui des merveilles et retranscrit très bien les morceaux de styles variés.

En matière d’habitabilité, la XE fait un peu pâle figure. Si les places avant offre un volume honorable, tout de même bien grignoté par l’imposante console centrale, les places arrière pâtisse franchement d’un manque d’espace. Il ne fait pas bon d’être de moyenne ou grande taille, de par la chute prononcée du dessin du toit, mais aussi à cause du volume réservé aux jambes. C’est à vrai dire très juste, le concept du compact étant un peu trop poussé ici. Le coffre joue aussi dans la cour des petits gabarits, avec un volume standard de 410 litres, ce qui la place dans la queue de peloton face à la concurrence directe.

Dans l’ensemble, Jaguar propose ici un univers bien fini et maîtrisé, mais qui manque un peu de personnalité. La sensation de qualité est très bonne, il faut bien le dire, mais j’aurai apprécié quelques habillages plus hauts de gamme dans la finition, avec des motifs de sellerie moins quelconques.

Sous le capot

Adieu les architectures moteur en V et les blocs à fort agrément de conduite, la philosophie est à la sagesse écologique et à la consommation raisonnable en énergie fossile. Ainsi la gamme moteurs de la XE n’est composée que de blocs à 4 pistons, avec pour nouveautés, en octobre 2020, l’arrivée d’un système MHEV sur le diesel D200 (hybridation douce). Ce dernier moulin, d’une puissance de 204 chevaux et d’un couple de 430 Nm, est disponible en propulsion ou transmission intégrale.

Côté essence, le choix peut être porté sur le P250 (250 ch) à propulsion, qui déploie un couple de 365 Nm ou le P300 (300 ch) couplé à une transmission intégrale, qui met à disposition 400 Nm de couple. Il s’agit bien de cette version de groupe motopropulseur qui équipe notre modèle d’essai.

La consommation d’essence observée s’équilibre autour de 8,1 litres aux cent kilomètres, avec un léger bond à 9 litres quand la berline est utilisée en milieu purement urbain. Ce qui demeure être un appétit somme toute contenu pour une cylindrée de 2 litres et 300 chevaux sous le capot.

Au volant

J’ai beau être chroniqueur automobile depuis quelques années, il y a de ces préjugés qui vous collent au cerveau. Pour Jaguar, il y a pour moi deux mondes : celui des méchants félins qui rugissent forts et celui des voitures un peu « papy ». Quand la XE apparaît dans mon calendrier des essais, je me fais immédiatement la remarque que ce n’est pas sur cette paire de semaines que je mettrai sur le grill une voiture. Je planifie donc des balades dans les grands espaces et longs trajets à travers le pays, tel un commercial à l’agenda surbooké.

Sur le papier, la proposition est tout de même très intéressante : un bloc 2 litres qui sort 300 chevaux et 400 Nm de couple, il y a de quoi être tranquille sur le macadam et simplement se laisser glisser au fil des virages. Dès le premier contact, la XE surprend. Elle est facile à prendre main, d’une taille vraiment contenue. Elle est vive dans la direction et souple dans le caractère, très souple même, trop à mon goût. Lâcher les chevaux dans le milieu urbain étant compliqué et totalement inutile, je mets en suspens mon jugement sur le moteur, en attendant un environnement plus propice pour le laisser s’exprimer. La route ouverte saura me dire si ce bloc Ingenium est véritablement anémique ou non. Il n’en reste pas moins que la berline britannique est un bonbon à conduire dans un trafic dense comme les rues exiguës de la Cité de Calvin. La suspension sait filtrer les imperfections de la route, tout en laissant ce qu’il faut en retour de châssis. Je peux ainsi sentir la chaussée, ce qui est vraiment plaisant.

Fini le béton, à moi la verdure et les tracés de macadam qui la zèbrent. Sans délai, je place la mécanique en mode « Sport » et je demande la pleine puissance au moteur. Quelle est ma déception, mon étonnement même. 300 équidés pour si peu de vigueur ? Certes, l’accélération est marquée, notable, mais pas digne de la puissance annoncée. Le caractère moteur m’apparaît comme très neutre, sans relief ni saveur, avec peu d’accroche et aucune nervosité dans la réponse comme dans l’élan. Avec la mention « R-Dynamic » dans le nom de l’auto, l’expérience laisse un goût franchement amer.

Je décide donc de me jeter dans un col, au contrôle de la boite de vitesse, via les palettes solidaires du volant. Le châssis me parait alors sain, réactif et rigide ; la direction est précise, bien que manquant d’un peu de dureté et se montrant aussi trop peu communicante. Quant au moteur, c’est toujours le même constat. Timide dans le bruit, peu éloquent dans les performances, une vraie déception.

Sur un sentiment d’inachevé, je me dirige pour rendre la voiture, déconfit par un ensemble si bien fait, et pourtant si peu fun. Certes le segment visé est celui des « Executives », mais combien parmi les clients potentiels aimeraient avoir le parfait compromis d’un moteur 4 cylindres parfaitement vivable en ville mais expressif sur les grandes routes ? Une majorité à mon avis.

Sur le point d’abandonner, je me dis alors : et si je désactivais l’électronique ? Certes, c’est téméraire, mais l’expérience serait probante. Tchao le contrôle de traction, à moi le droit accès à la perf’ moteur. Et ainsi, en un instant éclair, le ciel se dégage et la XE me met… une claque. Sèche, nette et sans bavure. Le chat de salon somnolent se transforme, sur la pression d’un bouton, en un vrai Jaguar hargneux. La réponse à l’accélérateur est directe et sans filtre, le moteur déploie ses qualités, toujours aussi calmement, mais avec une efficacité redoutable. La transmission intégrale fait des merveilles et la motricité est sans défaut. J’ai soudainement entre les mains une voiture qui a du panache et du coffre, sans pour autant se montrer dangereuse. Les roues ne patinent jamais et restent soudées au sol, sur les phases de fortes accélérations comme dans les virages amorcés à vive allure. Le châssis apparaît encore meilleur et encaisse sans broncher mes sollicitations, tandis que le train avant me met jamais en défaut, sur les prises de charge comme dans le maintien de la trajectoire.

Verdict

Une pression de bouton, et le monde en est chamboulé. Le contraste est saisissant mais débouche sur un constat un peu triste : le conducteur qui n’est pas curieux pourrait ignorer toutes les possibilités de la voiture. La XE est le parfait exemple d’une électronique qui obstrue furieusement tout le potentiel d’un véhicule. Si la sécurité est et doit rester la première des préoccupations, il m’apparaît comme illogique de couper les ailes à un véhicule ciblant une clientèle désireuse de plus de performances.

Au-delà de cette surprise, la Jaguar XE P300 est une bonne voiture, mais qui se distingue par son caractère très médian. Un gage de qualité pour les uns, ce sera, c’est certain, aussi un élément éliminatoire pour d’autres. C’est une automobile aux caractères ambivalents mais qui, en bout de ligne, peine un peu à convaincre.

Prix et options – Jaguar XE 2.0 P300 AWD R-Dynamic SE

Prix de base : CHF 64’300.-

Peinture métallique : 1’020.-

Pack Dynamique de conduite : CHF 2’000.-

Pack Technologie : CHF 1’900.-

Toit panorama coulissant : CHF 1’760.-

Sièges avant chauffants à réglages électriques : CHF 1’520.-

Pack d’aide à la conduite : CHF 1’440.-

Système audio Meridian (380 W / Subwoofer et 10 haut-parleurs) : CHF 960.-

Jantes 19” Style 5071, 5 split-spoke, Gloss Silver : CHF 960.-

Pack hiver : CHF 700.-

Pack intérieur Premium : CHF 660.-

Couvercle de coffre à ouverture électrique : CHF 560.-

Sièges arrière rabattables en configuration 40/20/40 avec accoudoir central : CHF 480.-

Vitres teintées y compris lunette arrière : CHF 460.-

Capteur de qualité de l’air : CHF 100.-

Prix TOTAL : CHF 78’820.-

Pour partager vos impressions, rendez-vous sur notre page FaceBook.

Nos remerciements à Jaguar Land Rover (Suisse) SA pour le prêt de cette Jaguar XE P300 AWD, ainsi qu’au garage Autobritt SA à Genève pour leur soutien logistique.

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