26 June 2018

Essayer une voiture « Swiss Made »… voilà un défi que Wheels And You n’avait pas encore relevé. C’est maintenant chose faite ! Nous avons fait connaissance avec la Meanie, une petite Lady qui cache bien son jeu. Accrochez-vous, ça va décoiffer !

  • 4 cylindres, turbo, essence, 1’984 cm3
  • 220 ch à 5’800 t/min
  • 340 Nm à 3’700 t/min
  • Boîte de vitesses manuelle, 6 rap.
  • Vitesse maxi : 200 km/h
  • 0 à 100 km/h : <4.0 sec.
  • Poids : 847 kg
  • Conso. mixte : 6.29 l./100 km
  • Emissions : Euro 6b
  • Prix : n.c.


Texte : Sébastien Morand / Photos : Claude-Alain Ferrière, Emil Frey Classics


Tout a commencé en 2012 lorsque Raffael Heierli, jeune ingénieur en mécanique, préparait son travail de diplôme à l’Université des Sciences Appliquées de Rapperswil. Son projet : concevoir une voiture à moteur central arrière avec un look rétro tout en s’assurant qu’elle soit homologuée pour la route et qu’elle puisse être fabriquée en petite série. Pour la carrosserie, son choix s’est porté sur la mythique Mini, l’originale bien évidemment ! Les examinateurs ont été très impressionnés par le travail rendu et tout logiquement Raffael a obtenu son diplôme.

Objectif atteint et tout aurait pu s’arrêter là, me direz-vous ? Oh non, car Raffael rêvait de cet engin et il n’avait pas envie qu’il reste au stade d’étude dans son mémoire. Gonflé à bloc, il écrit à Walter Frey, le patron d‘Emil Frey, en jouant la carte émotionnelle du fait que ce dernier avait fait de la compétition sur une Mini Cooper S et que le groupe a longtemps été l’importateur de la marque dans notre pays. Cependant, il n’avait pas vraiment d’espoir que tout cela devienne réalité. C’était sans compter avec la passion de M. Frey qui convoqua le jeune homme quelques jours plus tard afin qu’il lui expose son projet en détails. Ainsi commença l’aventure Meanie !

Esthétique

Tout d’abord, pourquoi Meanie ? D’une part il n’était pas envisageable de l’appeler Mini et donc il fallait bien lui trouver un nom. « Mean » en anglais signifie « méchant », alors qu’une terminaison de nom en « ie » donne une touche attendrissante. Clairement un mélange de gentillesse et de douceur avec une touche diabolique. Cette signification se retrouve également sur le badge qui est en fait un animal imaginaire reprenant le postérieur d’un loup et la tête d’un mouton. Le ton est donné.

Mais en fait ce ne sont que des détails que seul un œil avisé remarquera car sinon, la Meanie se présente sous l’apparence d’une véritable Mini, la dernière génération avant l’ère BMW. A noter qu’il s’agit de carrosseries neuves, commandées chez BMH (British Motor Heritage) en Angleterre, car il n’était pas question pour Emil Frey Classics de sacrifier des anciennes Mini.

Tout le monde connaît ce dessin iconique et cela confère à notre Meanie une apparence ultra sympathique. Personne ne peut imaginer que le diable se cache sous cette robe angélique, voir presque naïve. Au mieux, on peut s’interloquer de la présence d’un arceau. Mais là encore, il arrive fréquemment que des propriétaires passionnés en rajoutent un. Cependant, en y regardant de plus près, on constate qu’il n’y a que deux places et que tout l’arrière est compartimenté à l’image d’un autre mythe roulant, la R5 Turbo. Et c’est bien là que se cache la mécanique, j’y reviendrai.

A bord, nous trouvons deux baquets et un petit volant, le tout dans une finition très correcte pour de la petite série, on est loin des kit-cars qu’on peut trouver en Angleterre. Pourquoi ce parallèle ? Et bien simplement car on parle d’ultra petite production. La Meanie a été construite en 5 exemplaires uniquement, plus deux qui sont le prototype et la voiture 0, celle de son concepteur. C’est d’ailleurs ces deux autos que nous essayons aujourd’hui, les cinq produites ayant toutes trouvées acquéreur.

Les compteurs sont placés au centre du tableau de bord, comme sur celle dont elle a emprunté les lignes. Une petite boite à gant vient faire office de seul espace de rangement et c’est tout. Voilà du brut de chez brut, bien dans l’esprit d’une voiture de sport classique. Personnellement tout ce que j’aime, la part belle étant donné au plaisir de conduite ! Je trépigne d’en prendre les commandes. D’ailleurs, si le look est repris d’une Mini, tout le reste, hormis le moteur et la boîte, c’est à dire le châssis, les trains roulants, les freins, les suspensions, etc. a été développé et conçu ou adapté chez Emil Frey Classics.

Il a fallut 18 mois pour les démarches d’homologation et cela a demandé beaucoup d’énergie et de motivation. Raffael nous montre la documentation relative au processus, un véritable annuaire téléphonique de plus de 300 pages. Bravo à tous les membres de l’équipe d’avoir persisté pour arriver au bout de cette aventure. Ils ont d’ailleurs obtenu une homologation européenne qui leur permet de fabriquer jusqu’à 100 véhicules par année. Mais trop couteux à produire en Suisse, il a été décidé qu’il n’y aurait que cinq Meanie.

C’est un travail titanesque qui permet aujourd’hui de présenter la Meanie comme un véritable savoir-faire des compétences disponibles au sein de ce département du groupe Emil Frey. Nous avons d’ailleurs l’occasion de faire un petit tour dans les ateliers pour y découvrir plusieurs voitures classiques, de toutes marques, des plus prestigieuses aux plus populaires, en cure de réhabilitation, une véritable caverne d’Ali Baba. Les équipes ont les connaissances et les outils pour travailler la mécanique, la carrosserie, l’électricité et j’en passe. On ne parle plus de simples métiers de l’automobile, mais bien d’orfèvrerie !

Sous le capot

Justement, sous le capot avant, il n’y a pas de moteur, ni même de coffre d’ailleurs. On y retrouve un gros radiateur, la batterie et différents éléments mécaniques. Il faut ouvrir ce qui sert d’accès au coffre sur une Mini traditionnelle pour découvrir le cœur de la Meanie.

Placé en position centrale arrière, il s’agit d’un quatre cylindres 2.0 turbo emprunté à la sixième génération de VW Golf GTI. Toute la gestion de l’ECU a été refaite par les ingénieurs de Emil Frey Classics et ainsi ce moteur délivre 220 ch à 5’800 t/min pour un couple de 340 Nm à 3’700 t/min. Des valeurs sommes toutes assez banales de nos jours, si ce n’est que notre turbulent bolide pèse 847 kg à vide. De plus, la puissance est transmise sur les roues arrière exclusivement au travers d’une boîte manuelle à 6 rapports. Cette dernière provient également d’une Golf, mais diesel pour le coup, afin d’encaisser le couple, et dispose de rapports plus courts.

Sans aucune assistance à la conduite ni artifice de sécurité, les sensations promettent d’être au rendez-vous ! D’autant plus que si ces caractéristiques correspondent à toutes les Meanie, Raffael m’indique que le prototype développe lui 270 ch pour un couple de 460 Nm. Il profite d’insister sur le fait qu’en aucun cas je ne dois écraser l’accélérateur en courbe sous peine de me retrouver très rapidement à l’envers ou dans le décor.

Au volant

Voilà, il est temps pour moi de me glisser à bord du prototype. Avec sa peinture verte foncée, totalement dans l’esprit britannique, et un tableau de bord recouvert d’un revêtement à l’apparence de bois, j’ai vraiment le sentiment de me trouver à bord d’une banale Mini. Je démarre la bête et une sonorité rauque envahit l’espace ultra confiné qui fait office d’habitacle. Un léger rictus apparaît sur mon visage, quelle ambiance !

La souplesse du moteur à bas régime permet même de démarrer en deuxième, ce que je fais. Sans parler de puissance ou de performance, immédiatement je ressens des sensations rares que j’avais découvertes dans un seul autre engin « moderne », la Morgan 3 Wheeler. Difficilement explicable, mais c’est une combinaison de petites choses qui rendent ce genre d’expérience inoubliable.

J’aborde les premiers kilomètres en douceur et finalement je me crois presque dans une Mini classique, c’est cool. On arrive en campagne, quelques petits virolets agrémentent le parcours et comme je me souviens des recommandations de Raffael, je reste prudent avec la pédale des gaz. Je ressens clairement que c’est très vif et lorsqu’une ligne droite arrive, j’appuie un peu plus franchement sur l’accélérateur. Et là, c’est la claque ! Tel un manège de fête foraine, le petit bolide bondit en avant avec une force diabolique. En fait, pour illustrer au mieux la sensation, prenez un élastique, tendez le au maximum et relâchez tout… si si, je vous assure, c’est bien ça. Complètement débile comme effet, je me marre tel un gosse.

Au fur et à mesure du trajet, je me sens plus en confiance et j’accélère toujours plus franchement. Quel joujou extra et que d’émotions, c’est saisissant ! On s’arrête pour faire quelques photos et là Raffael vient vers moi pour récolter mes premières impressions. Je n’ai pas besoin de parler, en voyant la banane sur mon visage il comprend bien que je suis déjà accro tel un junkie.

Pour repartir, je prends le volant de sa voiture. Tout de bleu clair vêtu, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur, cet exemplaire affiche un côté plus racing, j’aime beaucoup. Immédiatement je constate que l’insonorisation et l’isolation sont meilleures, la direction est plus précise et l’embrayage un peu moins direct. Raffael m’explique qu’ils ont énormément travaillé entre le prototype et ce modèle afin de corriger tous les petits défauts et rendre le produit le mieux fini possible. Je peux également admirer la dernière Meanie des cinq fabriquées et constater qu’il y a encore des améliorations. Je vous le disais avant, cette Meanie est une vitrine pour Emil Frey Classics, il est donc très important d’offrir un excellent niveau de finition à l’image du savoir-faire et de la rigueur qui sont souvent associés à la Suisse.

Moins brutale que le prototype, cette Meanie offre tout autant de sensation. La différence de puissance et de couple est visible, mais cela reste enivrant à conduire. J’alterne mon essai en passant d’une voiture à l’autre, avec à chaque fois le même plaisir tant cette Meanie est géniale. Ce qui est d’autant plus surprenant, c’est que l’auto reste parfaitement utilisable en ville car les commandes ne sont ni dures, ni difficiles à manier.

Verdict

« A wolf in sheep’s clothing », traduit littéralement « Un loup habillé en mouton », voilà comment la Meanie est présentée par son concepteur et, à mes yeux, cela résume parfaitement ce qu’elle est. Tout le monde vous regarde avec le sourire lorsque vous passez quelque part, mais personne n’imagine à quel point elle cache son jeu. J’aurai d’ailleurs bien aimé entendre les commentaires des deux motards qui me suivaient sur les petites routes…

Les sensations ne sont bien évidemment pas aussi époustouflantes qu’au volant d’une supercar, à l’instar d’une McLaren 720S essayée récemment, mais avec la Meanie je ressens la même chose que lorsque j’avais essayé le 3 Wheeler. A savoir une envie indescriptible de toujours rouler plus pour découvrir encore mieux cet engin dans le but ultime de peut-être arriver à le dompter. Pour le coup, avec cette Meanie, l’affaire semble bien plus corsée qu’avec la Morgan. Mais je veux bien signer un pacte avec Satan pour tenter l’aventure. Malheureusement cela ne sera pas possible car il n’y en plus à vendre et, pour l’instant, les cinq heureux propriétaires ne sont pas enclins à lâcher leur joujou. Dans un sens ce n’est pas plus mal, car la plaisanterie a un coût non négligeable. Lequel me direz-vous ? Pas vraiment important, car on parle d’un objet unique procurant des sensations exceptionnelles, sans compter le travail pour le produire. Libre à chacun donc d’imaginer ce que ça peut valoir…

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Nos remerciements à Emil Frey Classics SA pour la découverte de cette Meanie 2.0 T et tout particulièrement à Raffael Heierli pour le temps consacré.

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