Essai – Renault Alaskan dCi 190 4×4 : Un air de déjà-vu

Alors que la tendance des SUV bat son plein depuis quelques années maintenant, certains constructeurs ont cru percevoir dans cette mode aux véhicules hauts une carte à jouer pour imposer dans nos contrées un autre type d’automobile fort populaire dans le nouveau monde : les pick-up. Renault, avec son Alaskan, fait partie de ces marques qui tentent le coup.

  • 4 cylindres, diesel, biturbo, 2’298 cm3
  • 190 ch à 3’750 t/min
  • 450 Nm de 1’500 à 2’500 t/min
  • Boîte de vitesses automatique, 7 rap.
  • Vitesse maxi : 180 km/h
  • 0 à 100 km/h : n.c.
  • Poids : 2’139 kg
  • Long./larg./haut. (mm): 5’399 x 1’850 x 1’841
  • Conso. mesurée : 11.28 l/100 km
  • Emissions CO2 : 183 g/km (G)
  • dès CHF 44’426.-, mod. essayé : CHF 52’115.-


Texte et Photos : Matthieu Giraudier


Si la commercialisation de l’Alaskan en Europe remonte au début du mois de septembre 2017, l’idée de lancer un pick-up circule chez la marque au losange depuis quelques années déjà. Les concepts-car Renault Duster Oroch puis Renault Alaskan Concept en avaient été la démonstration, des études qui se sont avérées être, au final, des véhicules quasi-finis et maintenant commercialisés.

On en vient tout de même à se poser de multiples questions : est-ce bien pertinent de vendre pareils véhicules sous nos latitudes, là où les villes sont plus exiguës, là où les routes sont plus étroites, là où vagabonder hors des voies bituminées n’est pas un exercice si répandu ? Est-ce bien utile d’ajouter un pick-up à la gamme alors que l’alliance Renault-Nissan profite déjà du réputé Navara et que le partenariat industriel avec Mercedes a donné vie au Classe X ? Alaskan, mais qui es-tu ? Une automobile bien à part ou un pâle clone ?

A l’extérieur

L’Alaskan est sans grande surprise basé sur la même plateforme que le Nissan Navara. Et, pick-up oblige, le design ne fait ni dans la finesse à l’avant, ni dans le détail et l’original à l’arrière. La face antérieure est dans un style très européen : bien que la forme globale soit trapue, la grille de radiateur est fine et sobre, en monobloc, et encadrée par des projecteurs full-LED à doubles cellules, au rendu distinctif de la marque. Le bouclier est imposant et intègre avec sobriété les feux antibrouillard. La protection plastique de châssis, couleur chrome, ajoute un petit côté baroudeur à l’ensemble.

La partie postérieure est très traditionnelle, avec deux colonnes de projecteurs et un bouclier au format contenu, fini chromé sur notre modèle d’essai. Le débattement entre les roues et les arches est particulièrement conséquent, signe clair de la capacité de l’Alaskan à accepter de lourdes charges sur le pont arrière, en plus de lui conférer une habilité à se mouvoir facilement en milieu dégradé.

Avec pareille machine, il me paraît important de s’attarder sur les spécifications purement techniques et utilitaires. Au-delà de lancer à tout rompre moult chiffres, je préfère passer le « Frenchy » dans un comparatif musclé avec deux des rois des pick-up, l’incontournable Ford F-150 et l’iconique Chevrolet Silverado. Un combat inégal contre ces colosses américains, pensez-vous ? Pas si sûr !

Pourtant, l’Alaskan part avec un désavantage : le volume de la benne n’affiche que 1’126 litres, alors que les homologues américains annoncent à minima 1’450 litres dans les versions les plus standards. Pourtant le poids maximal chargeable sur le pont du Renault est de 949 kilos, avec la possibilité d’ajouter une remorque freinée de 3.5 tonnes (750 kilos si non freinée). Et sur ce terrain, les « trucks » US ne font pas aussi bien : un F-150 et un Silverado chargent respectivement 848 et 900 kg et tractent les deux la même masse remorquée maximale, mais pas avec le même moulin que notre Alaskan bien local. En effet, Ford propose en entrée de gamme un 4 cylindres 2.7 L de 350 ch et 540 Nm tandis de Chevrolet met à disposition un V6 de 4.3 L déployant 285 ch et 413 Nm. On est tout de même loin du diesel biturbo 2.3 L de 190 ch et 450 Nm de couple proposé par la firme française. Une efficacité qu’il faut, je pense, saluer.

Néanmoins, comme souvent, toute bonne chose se voit entachée de défaut. Question qualité de benne, l’Alaskan a encore des efforts à fournir. Notre modèle de test est pourvu de l’option « Protection de benne et de l’abattant de benne thermoformée ». En d’autres termes, un plastique dur supplémentaire recouvrant la benne, lequel est à mon goût de maigre qualité, rapidement cassable et peu compatible avec une utilisation « heavy duty », ou même pour des travaux qu’un paysagiste pourrait accomplir, par exemple.

A l’intérieur

Renault ne propose pour le moment qu’une version avec cabine étendue. Il est envisagé, mais pas avant 2020 selon les rumeurs, d’offrir une itération avec cabine simple, à 3 places assises.

Le ressenti global de qualité est, d’une manière absolue, assez moyen. Bien que gardant en tête que l’Alaskan est un véhicule utilitaire avant toute chose, je regrette l’emploi poussé de plastique dur tout droit sorti d’une Dacia et de plastique argenté sur le volant, la console centrale ou encore sur les cadrans, usage qui aurait dû être proscrit dès l’an 2000.

Ces défauts sont gommés par le confort des assises qui, à l’avant, ne mettent jamais en défaut le bien-être de l’occupant, même sur de longues distances. A l’arrière néanmoins, la donne est différente. La banquette n’est pas exceptionnelle et l’espace réservé aux jambes est très limite. La double cabine apparaît alors comme une solution d’appoint, un bonus.

L’électronique embarquée est, elle aussi, de facture très médiane, avec du très bon et du nettement moins satisfaisant. Cette version « Intens » embarque les très pratiques caméras de manœuvre, dont l’écran central affiche alternativement l’arrière ou l’avant (selon le rapport engagé) et la vue 360° ; ou alors l’arrière ou avant et la vue du pneu avant droit. La résolution est d’ailleurs très bonne et cette fonctionnalité s’avère être un gros plus pour manœuvrer ce joujou en milieu accidenté. D’autres technologies viennent en complément tels que le limitateur/régulateur de vitesse et les capteurs de parcage AV/AR. A nouveau, le positif se voit altéré par de petits détails négatifs. Ainsi cette finition haut de gamme n’autorise à avoir qu’une vitre électrique automatique, les autres n’ayant pas la fonction automatique. Franchement dommage pour un véhicule valant plus de CHF 50’000.-.

Le système d’infodivertissement vient tout droit du groupe Nissan, une erreur à mon sens, tant celui proposé par Renault se démarque en bien par son ergonomie excellente et logique, en plus d’être davantage esthétique et réactif que celui proposer dans ce modèle.

Sous le capot

La proposition en moteur est pour le moment limitée – et parfaitement identique à ce que propose le Nissan Navara – puisque seul le bloc dCi twin-turbo de 2.3 L est disponible. Il est décliné en deux puissances, 160 et 190 chevaux, la plus puissante des possibilités pouvant être accompagnée à choix d’une boîte manuelle 6 rapports ou automatique 7 vitesses, la première n’accueillant que la boîte en H. Cependant, chaque choix est systématiquement 4×4, avec un blocage du différentiel arrière de série, tout comme la commutation « Shift on the fly » entre les modes propulsion, transmission intégrale « high » et 4LO.

Pour cet essai, Renault nous met à disposition la version à 190 chevaux et boîte auto. Sur le papier, les différences entre le modèle à boîte manuelle et le nôtre sont assez limitées, le désavantage versant du côté de l’automatique. Si la charge utile maximale est plus grande pour l’auto (+8 kg), la consommation annoncée par le constructeur est meilleure chez la manuelle, tout particulièrement en milieu urbain (-1.8 l/100 km).

En ce qui me concerne, je constate une consommation globale de 11.28 l/100 km sur quelques 777 km parcourus, dans un cycle très mixte, mêlant ville, routes ouvertes, terrain et cols de montagnes. Je constate par ailleurs que notre Alaskan est très susceptible au type de conduite, pouvant être à la fois très gourmand si un style décomplexé est adopté, mais aussi très économe en cas de conduite éco-responsable.

Au volant

Bien qu’apparaissant massif, l’Alaskan est en fin de compte un pick-up au format « pocket ». Avec ses 1’850 mm de largeur, il se permet même d’être plus étroit d’un Scenic ! Haut de 1’841 mm, il est aussi un véhicule qui se glisse dans la très vaste majorité des parkings couverts. Le seul paramètre hors-norme, et pour cause, reste sa longueur de 5.4 mètres, demeurant le seul petit écueil dans la vie de tous les jours.

Car ce qui émerge immédiatement, c’est son caractère facile à conduire, facile à vivre. Il se prend aisément en main et se laisse diriger sans peine. Certes, la direction est vraiment ferme, il n’en reste pas moins qu’elle est précise. Je sens en permanence où le véhicule va, dans quel état est la route, ce qui distille immédiatement un sentiment de confiance dans l’engin. Je parcours ainsi les rues étroites de villages genevois sans la moindre crainte. Quand les espaces se referment, que les bordures de trottoir pour bus menacent, je dégaine sur pression d’un bouton les caméras d’assistance, et le tour est joué.

J’imaginais à l’avance une dynamique franchement molle et pourtant, ce bloc 2.3 L twin-turbo me surprend. Il confère au bébé de 2’139 kg de nettes accélérations et des reprises honnêtes, suffisantes pour s’extirper de situations inconfortables.

Une fois les agglomérats d’habitations quittés, le pick-up français reste très agréable. Bien suspendu, bien insonorisé, toit ouvrant panoramique ouvert (en option), je me surprends même à flâner tranquillement, tant j’oublie vite que je suis dans un véhicule utilitaire.

L’exercice autoroutier ne réserve pas de surprise, l’Alaskan sachant se montrer souple. Je note simplement que cette version dotée d’une boîte automatique 7 rapports est, sur le moment, le bon choix, car la boîte manuelle à 6 vitesses doit rendre un périple à 120 km/h nettement moins tranquille.

Le terrain : du gravier, de l’herbe, des flaques d’eau, des pentes, des rigoles, voilà ce que j’attendais avec impatience. Ce moment où je peux mettre à contribution la machinerie, essayer la transmission intégrale, me faire une idée de ce que vaut l’Alaskan en dehors des sentiers battus. Une fois encore, je suis agréablement surpris. La motricité est excellente en tout temps et jamais je ne sens une perte de couple dans des dérapages incontrôlés. Le différentiel à glissement limité fait des merveilles lors d’alternances de revêtements, le louvoiement de la caisse étant très contenu. Autre point positif, l’assistance à la descente est sans faille apparente. Dès que le dévers passe au négatif, la technologie embarquée prend le contrôle et garde la voiture en ligne à un rythme constant.

Malgré ses qualités motrices manifestes, l’Alaskan n’est pas un champion du franchissement. Bien que les angles d’attaque et de départ soient particulièrement bons pour le segment, l’empattement de 3’150 mm freine immédiatement les ardeurs. Si la grimpe peut se faire sans difficulté, passer des bosses saillantes est fortement déconseillé.

Dernier exercice, obligatoire lors de mes virées d’essai, les routes de montagnes. En montée, à un pourcentage d’inclinaison moyennement prononcé, on sent immédiatement que l’Alaskan mobilise toutes ses ressources. Le calme diesel de Monsieur et Madame Tout-le-monde laisse la place à un soufflant moteur de camion, rugissant à plein. A la vue de la dynamique constatée à vide, il est certain qu’avec une benne chargée avec 800 kilos de fournitures, l’Alaskan montrerait très vraisemblablement ses limites, le couple plafonnant à « seulement » 450 Nm.

Verdict

Au final, l’Alaskan apparaît comme un pick-up taillé pour nos contrées, aux dimensions contenues, facile à utiliser et sans nul doute pratique. Il est axé sur l’utilitaire et sa variante automatique emporte un bon groupe motopropulseur autorisant un transport de charge conséquent pour une efficacité énergétique de bonne facture. Une de ses faiblesses majeures demeure le prix, difficile à justifier quand on considère l’intégralité de la proposition.

Le plus remarquable demeure que l’Alaskan tient la comparaison avec les mythiques « trucks » américains sur le plan technique. Il est en revanche en-deçà côté hospitalité, axe sur lequel le Renault aurait pu créer une vraie différence, notamment avec son alter-ego le Nissan Navara dont il n’est, malheureusement, qu’un jumeau monozygote.

Prix et options – Renault Alaskan Twin-Turbo dCi 190 4×4 automatique “Intens”

Prix de base : CHF 47’442.-

Blocage de différentiel arrière : CHF 808.-

Pack Light : CHF 1’400.-
(Toit ouvrant électrique coulissant en verre + éclairage d’habitacle avec lampes individuelles dans le plafonnier)

Peinture métallisée “Brun Vision” : CHF 969.-

Attelage standard 13 broches : CHF 755.-

Pack protection : CHF 741.-

Prix TOTAL : CHF 52’115.-

Pour partager vos impressions, rendez-vous sur notre page FaceBook.

Nos remerciements à Renault Suisse SA pour le prêt de ce Renault Alaskan, ainsi qu’à la filiale de Plan-les-Ouates du groupe RRG Léman pour leur soutien logistique.

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